mardi 14 octobre 2014

Battista revenait avec le printemps (Renata Ada-Ruata)



Détails sur le produit

  •  Battista revenait avec le printemps (Renata Ada-Ruata)
  • Broché: 352 pages
  • Editeur : EDITIONS DE L'AUBE (2 octobre 2014)
  • Collection : Regards croisés
  • Langue : Français
  • ISBN-10: 2815910721
  • ISBN-13: 978-2815910729



 
Résumé :
Battista a douze ans quand il part pour la première fois avec son père, sur les routes italiennes, (viendront plus tard les routes suisses, puis françaises). De la Toussaint au printemps, chaque année, les hommes de ce village du Piémont italien partent vendre leur de travail dans les villages et les villes. Ils sont rémouleurs, étameurs… En échange de leur travail, ils obtiennent le gîte, le couvert, ou de l’argent qui servira plus tard lors de leur retour au village. Les pères transmettent ainsi à leurs fils les savoir-faire et les techniques qu’ils ont eux-mêmes après de leurs pères sur ces mêmes routes.
Au gré de leurs pas, ils observent sans vraiment le savoir, la montée du fascisme, l’arrivée de l’industrialisation.
Et chaque été, ils rentrent chez eux, la tête et le cœur pleins de rencontres, de mots, d’images.  
Si sur les routes Titto (le surnom de Battista) apprend le métier de son père, de retour, il les raconte à son maître et à son cousin Neto (parti lui sur des routes différentes). Ce maître d’école est plus qu’un enseignant : à chacun des départs des deux garçons, il leurs donne un livre pour qu’ils s’entrainent à lire, à écrire et qu’ils découvrent également d’autres mondes.
Et les mots de Battista nous racontent la nature, la relation des hommes avec la nature, la relation des hommes avec les femmes, les relations d’un jeune homme avec sa Grand-Mère, avec sa mère et son frère, avec son père...
Il évoque aussi la difficulté de grandir, de devenir un homme : les renoncements auxquels cela conduit parfois.
Un récit envoûtant !!!!


Mon avis : 

Douceur est le mot qui me vient à chaque fois que je pense à ma lecture de ce livre.
Je ne suis généralement pas très attentive à la couverture mais pour une fois je trouve que celle-ci correspond exactement au livre. Un adulte et un enfant qui s’éloignent dans le crépuscule italien…

J’ai d’abord été désarçonnée par le style de l’auteur. En effet il s’agit d’un long dialogue entre Battista, dit Titto, et celui que l’on identifie au fur et à mesure comme son maître d’école. Un long dialogue entre un enfant qui raconte la façon dont il est devient adulte et celui qui lui a donné le goût des mots.
Car c’est ce maître d’école qui l’a sans arrêt poussé à mettre en mots ses émotions, à essayer de les écrire (acte peu évident pour un jeune homme dans un monde où l’écriture est plutôt utilitaire).
Ce dialogue n’utilise pas les formes écrites habituelles (tirets, guillemets, retour à la ligne). Le maître intervient au cours du récit de Titto, et seule l’utilisation des pronoms personnels «  tu » ou «  vous » nous prévient de cette intervention.

J’aurais pu arrêter mais j’ai bien fait de continuer ma lecture. J’ai été bercée par ce livre. Non pas qu’il soit soporifique, mais je m’aperçois que c’est un peu comme si Battista m’avait glissé dans sa poche et emmenée avec lui. C’est un peu comme si j’avais arpenté à ses côtés les routes de l’Italie,  appris avec lui le métier d’étameur, observé avec lui la montée de l’idéologie de Mussolini.

L’écriture de l’auteur est vraiment toute en rondeur, en douceur (ça me fait bizarre d’écrire ce genre de remarque mais je ne trouve pas d’autres qualificatifs), aucun heurt. C’est une écriture que je qualifierai de poétique, tant  elle s’adresse à tous les sens du lecteur. J’ai vraiment ressenti de la tendresse pour ce garçon que l’on voit devenir un homme et qui pose un regard candide sur le monde qui l’entoure, sur ces évolutions. Il note, remarque sans jamais juger, ou critiquer.
Le personnage de la grand-mère aussi m’a profondément touchée. On sent une femme très philosophe, qui a pris le temps d’observer le monde qui l’entoure, qui laisse les autres agir selon leur volonté. Aucune méchanceté…

Merci à Virginie Jullion  pour cet envoi.



Ce livre est un vrai COUP De CŒUR

 
Citations :

« Les nouvelles, s’il n’y en a pas, on sait bien que ça veut dire qu’elles sont bonnes. Les mauvaises, elles arrivent toujours plus vite que la foudre. »
«  Personne ne m’a appris comme Grand- Mère. Elle m’a ouvert le grand livre de la nature. Celui des hommes avec ses petitesses et ses grandeurs, tu ne l’as vraiment connu que plus tard, loin d’elle. »

«  Au printemps suivant déjà vous n’étiez plus les mêmes. Enfin vous étiez les mêmes  mais différents, vous aviez perdu une part de votre enfance, de son innocence. »

«  Le monde de Grand-Mère s’effritait. Vous entendiez moins la magie et plus clairement la rudesse, l’injustice et la peine. »

«  Je suis un trouillard doté d’une volonté de fer. Peut- être que c’est cela le vrai courage. Savoir vers quoi on va, les risques que l’on prend et y aller tout de même parce qu’on pense qu’on le doit.

«  A nos terres on y est attachés, mais elles ne nous nourrissent pas assez. Sont ingrates, ne se laissent pas facilement apprivoiser, nos terres. Il faut y mettre de la sueur et du temps. »

«  Avec les années tu as compris qu’au fond ce n’est pas qu’il ne t’aimait pas Gigi, il était jaloux. Que la mère et surtout votre grand-mère portent tant d’attention à l’enfant fragile que tu étais, devait le remplir de rage, il se sentait mal aimé. Pour éloigner ses déceptions, ses rancœurs, il avait choisi la dérision, l’humiliation de celui qui en était la cause. »

« Peu à peu tu as découvert un monde de tensions et de désirs. Un monde puissant et poisseux, un monde qui t’éloignait de la légèreté de ton enfance dans les arbres, t’éloignait des contes merveilleux de ta grand-mère. Un monde à la fois plus simple et moins facile à comprendre. »

«  Ce n’était pas vrai, au monde j’étais plus présent qu’eux tous, différemment. Mais cela, ils n’arrivaient pas à le comprendre. Là où ils ne voyaient, n’entendaient que ce qui était, toi tu voyais aussi d’autres choses, comme si derrière chaque chose, s’en trouvait une autre et encore une autre, comme si la chose elle-même ouvrait pour toi ses tiroirs secrets, te révélait ses trésors de formes et  de couleurs, ses histoires. »

«  Tu aimais tellement que j’ouvre pour toi les voies de la connaissance. J’avais l’impression qu’une  vie entière ne suffirait pas pour tout savoir. Vous le confirmiez, mais affirmiez que,  même si on ne pouvait pas tout savoir, apprendre était une belle aventure. »

« Tu as réalisé à quel point pouvoir lire  était quelque chose d’extraordinaire, pouvoir lire et écrire. On lisait, on écrivait un mot et hop on voyait apparaître un objet ou un visage ou un paysage. […] On écrivait une phrase avec des mots et cela se mettait à vivre dans la tête de celui qui la lisait. De la magie. »

«  Écrire dans ma tête oui, des phrases,  des phrases dans ma tête, mais les mettre sur un papier, moi je n’avais pas cette capacité-là, non, ni même jamais j’aurais cette prétention. »

«  Alors une envie envahissante de la conserver, elle, [sa grand-mère], sa vie l’envelopper dans des phrases que je pourrais lire et relire m’a pris. »

« Tu commençais à saisir ce que les gens pouvaient valoir ou pas, du moins tu le pensais, tu commençais à te méfier des paroles et à tenir compte surtout des faits. »

«  Les trésors qu’on rapporte peuvent se trouver cachés dans nos cœurs, non révélés à la face du jour. »

2 commentaires:

  1. Tu as bien fait de t'accrocher, finalement.

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    1. Oui et je vous conseille de ne pas lire mon piètre résumé mais le livre!!!!

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